"Non à la spéculation foncière, le pays Basque n'est pas à vendre!" Chacun connait ce slogan taggé sur nos murs, répété à l'envi par les militants abertzales. Quelles conséquences tirent-ils de cette affirmation péremptoire? A Anglet en particulier.
Avant d'aller plus loin, rappelons que selon l'actuel Plan Local de l'Habitat, 97% des logements construits avant 2010 sur l'agglomération Bayonne-Anglet-Biarritz n'étaient accessibles qu'à 20% de la population. Redonnons aussi un chiffre donné par les promoteurs eux-même: 70% des logements neufs qu'ils construisent sont achetés par des investisseurs, 30% seulement par des propriétaires-occupants dont bon nombre d'ailleurs utiliseront leur bien en résidence secondaire. C'est ce qu'on appelle le marché "libre". Les prix sont "libres", et les acheteurs libres de faire ce qu'ils veulent de leur bien.
L'actuelle avenue de Bayonne
Alors que
faire pour loger nos compatriotes, ceux qui vivent toute l'année sur notre territoire, et qui ne peuvent acheter un logement à 4000 €/m2? (1)
Je vois une réponse: construire du logement "aidé", car celui là on est sûr qu'il sera la résidence principale de celui qui l'occupe. C'est à dire construire du logement locatif social où de l'accession sociale à la propriété. C'est pourquoi sur Anglet, la Municipalité exige des promoteurs, sur toutes leurs opérations, qu'ils construisent au moins 30% de logements sociaux. Voilà pourquoi aussi, pour toutes les opérations d'envergure qu'elle maitrise, elle se fixe l'objectif de réaliser 40% de logement locatif social, 20% d'accession sociale et seulement 40% de logements du marché dit "libre". Agir ainsi c'est construire pour tous, et assurer la mixité sociale aujourd'hui gravement menacée à Anglet. Je redonne une fois de plus ce chiffre inquiétant: En 10 ans notre ville à gagné 4000 habitants mais a perdu, dans le même temps 500 élèves dans ses écoles, soit 20% de leurs effectifs.
On pourrait donc penser que les abertzales sont d'accord avec cette politique. "Le Pays Basque n'est pas à vendre!". Et bien non, nous n'avons pas compris le message. Pour Angeluzain, le groupement des nationalistes basques d'Anglet, le projet de construire près de 500 logements (dont environ 200 logements sociaux) le long de l'avenue de Bayonne est mauvais car "elle [la Municipalité de gauche] concentre ces logements sociaux dans un périmètre trop rapproché. Ceci est contraire à la tradition de mixité de notre ville. Nous lui suggérons... de répartir ces mêmes logements sociaux sur l'ensemble de la RD 810, à droite et à gauche, dans un périmètre qui va du Cadran près de Casino, jusqu'au rond-point des hotels sur cette même route, en allant vers l'aéroport. Il faudrait imaginer un projet plus audacieux [...] en lieu et place d'immeubles de 11 étages(2). En construisant des immeubles de logements sociaux mieux répartis, ce projet à davantage de chance d'être accepté par la population".
Donc pour Angeluzain, il faut moins de logements sociaux. Et par voie de conséquence plus de marché libre. Pour Angeluzain, le slogan complet doit être "le Pays Basque n'est pas à vendre... sauf aux promoteurs!" 40 % de logement social c'est "trop concentré"!
" Voilà que [la Municipalité] veut absoluement remplir son objectif de 12% de logements sociaux d'ici la fin de sa mandature" se scandalise Angeluzain. Je confirme: on veut, absoluement! J'aggrave même mon cas: Notre objectif est précisément de 12,7%. Angeluzain est contre? Il faudra qu'elle l'explique aux 2000 foyers qui ont déposés un dossier de logement social sur Anglet, et qui attendent impatiemment, certains depuis plusieurs années, que les logements promis sortent de terre. Je ne crains pas de déplaire à l'opposition municipale, et à Angeluzain en particulier. Mon regret serait que leurs manoeuvres aboutissent et nous empêche de répondre aux besoins de ces compatriotes. Dont certains on cru les abertzales quand ils affirmaient "le Pays Basque n'est pas à vendre". Nous ferons sans leur soutien, mais qu'ils en soient persuadés, nous ferons. C'est affaire de justice.
PS: J'ai déjà écrit que j'étais prêt à engager sur ce blog un dialogue loyal avec les abertzales sur les problèmes d'urbanisme et de logements. J'avais fait cette proposition persuadé que nos désaccords sur ces dossiers reposaient sur des malentendus, et que nous nous retrouverions certainement sur les objectifs d'un urbanisme "durable" pour une ville plus désirable et plus solidaire. Je renouvelle mon offre, quoique je commence à douter.
(1) Prix moyen sur Anglet d'un logement neuf. Ce qui amène un simple T3 de 70 m2 à 280 000€.
(2) Sur les 9 immeubles du projet, le plus haut fait 11 niveaux, soit 10 étages. La hauteur moyenne est de 8 niveaux, soit 7 étages, ce qui correspond aux hauteurs des immeubles existants. On lira dans ce blog les nombreux articles consacrés à la hauteur des immeubles.