J'ai indiqué dans le précédent article que le futur PLU d'Anglet visait à promouvoir un "urbanisme de projet". Pour expliquer cette expression (1) je vais prendre un exemple sur Anglet.
Le long de l'actuelle avenue de Bayonne (ex nationale 10) le PLU de 2004 dans la zone UA ne prévoyait pas de COS: il n'y avait donc pas de borne à la densification,
la constructibilité était sans frein du moins de prime abord. Mais il limitait les hauteurs à R+3+attique. Conséquence: Les porteurs de projets densifiaient tous au maximum leur parcelle en
utilisant l'emprise au sol et les hauteurs maximum; ils proposaient tous les même volumes, très étalés pour utiliser le sol au maximum, sans un coin de verdure, sans placette ou large trottoir. Les
espaces libres de toute construction étaient réduits le plus possible pour produire de la surface de plancher. Et tous les immenbles avaient la même hauteur, R+3+attique, pas plus puisque c'était
interdit, mais surtout pas moins pour ne pas dégrader la rentabilité du terrain.C'est ce que j'appelle de l'urbanisme "administré" puisque le réglement induit une volumétrie. On peut certes avoir
une architecture de qualité mais dans un corset administratif rigide (voir photo).
Immeuble Aïtzina: R+3+attique. Un immeuble conforme au PLU de 2004.
Nous proposons sur cette même zone de ne pas mettre de limite de hauteur. Mais, à l'inverse de nos prédécesseurs, nous imposons un COS assez contraignant, de 1,25. La constructibilité est définie, mais pas le volume construit puisqu'on peut jouer sur les hauteurs, donc sur l'emprise au sol qui sera plus faible si on choisit de monter un peu. La collectivité peut même négocier des espaces publics en pied d'immeuble, puisque cela ne réduit pas la constructibilité de la parcelle. On choisira peut-être de faire R+3+attique, comme précédemment, ou du R+6 si le programme et la forme du terrain le justifie, ou d'utiliser des hauteurs variables, là du R+2, ici du R+5, pour jouer avec le soleil, l'environnement naturel ou bâti, des contraintes fonctionnelles...
Le dialogue entre le maitre d'ouvrage et la collectivité prend tout son sens puisque le projet n'est pas figé au départ. L'architecte-conseil de la ville ne se contente pas de donner un avis sur le choix des couleurs ou des matériaux: il peut, dans un dialogue fécond avec l'architecte du projet, le faire évoluer dans l'intérêt de tous. La densité globale de l'ilot ou du quartier est défini par le réglement, pas la forme architecturale. On pourra plus facilement négocier avec les promoteurs pour leur faire prendre en compte des paramètres qui dépassent la parcelle: un accès pour des riverains, une trame verte et bleue, un aménagement public, une perspective intéressante, ou une vue vers un grand paysage...
Mais il ne suffit pas d'ouvrir un espace de dialogue entre collectivité et maitres d'ouvrage. Encore faut-il savoir quel but poursuit-on dans la co-élaboration du projet. Quelle ville voulons-nous construire? Le "projet de ville" qui sous-tend le PLU prend alors tout son sens, et les projets que nous avons élaborés pour tel quartier ou tel secteur. Le projet "coeur de ville", celui du Maharin, ou des Landes de Juzan, les orientations d'aménagement définies pour Melville-Lynch ou le Refuge sont des outils complémentaires du PLU, dont ils précisent les orientations sur un territoire donné. Un "urbanisme de projet" suppose en définitive que les décideurs est une vision claire de la ville et qu'ils la fassent partager. C'est plus compliqué qu'un urbanisme administré, mais c'est beaucoup plus créatif, donc riche de potentialités nouvelles.
(1) il va sans dire que je ne suis l'inventeur ni de l'expression ni du concept.